La Fonderie à Canons de Liège

26 août 2007


« On ne peut parler de la fabrique d’armes à Liège, sans mentionner en même temps la fonderie royale de canons, qui, par son ensemble, son importance, sa tenue intérieure, mérite d’occuper non-seulement le premier rang entre les divers établissements analogues de l’Europe, mais doit être encore recommandée à l’attention des industriels qui aiment à étudier les progrès des procédés et à en connaître les résultats.

La fonderie de canons existe à Liège depuis 1802; trois militaires se sont succédé jusqu’ici dans la direction de cet établissement, le capitaine Déranger, le général Huguenin et le major Frédérix. Tous trois semblent avoir pris à lâche de prouver qu’entre la science des armes et la science de l’industrie, la distance peut être facilement comblée, et que l’une sait alors prêter son appui à l’autre. Et en effet, l’administration de ces trois directeurs se rapporte à trois époques distinctes, à l’Empire, puis à la période hollandaise, enfin au régime actuel. Si nous envisageons la situation de l’établissement à chacune de cès trois époques, nous la trouvons marquée par l’adoption des procédés les plus avancés qui distinguent chacune d’elles.

A la direction du capitaine Béranger remontent l’emploi des premières machines à vapeur dans lesquelles le mouvement alternatif est transformé en celui de rotation, et l’établissement du premier chemin de fer que l’on ait vu dans le pays.

Avec la direction du général Huguenin commence le moulage des bouches à feu en fonte de fer avec une supériorité qui peut soutenir toutes les comparaisons de l’étranger, système que jusqu’alors la Suède seule avait osé adopter pour l’artillerie de campagne.

Enfin à la direction du major Frédérix se rattachent la confection des pièces de bronze, l’introduction de l’air chaud dans les diverses opérations sidérurgiques de la fonderie, plusieurs améliorations obtenues par la construction des fourneaux à réverbères et par l’emploi du coke provenant des escarbilles, dans la fusion et le moulage de la fonte.

Liège, la Fonderie Royale de CanonsL’établissement dans son aspect extérieur se compose au milieu d’une cour immense: d’un atelier de boulets, d’un atelier pour la fonderie des canons, d’un atelier de forgerons , d’un autre pour les tourneurs, d’un autre encore pour le sciage et le forage, enfin d’un atelier de menuiserie, et de plusieurs magasins pour le cuivre et autres objets de menu détail.

Dans l’intérieur des ateliers, on compte douze fourneaux à réverbère, douze bancs de forage, quinze feux de forges ; un maka et un four à chauffer les grosses pièces. Le mouvement est imprimé par trois machines à vapeur.

La fonderie de Liège est la seule en Europe qui réunisse la confection des pièces de fer et des pièces de bronze. Si elle ne possède pas comme quelques fonderies étrangères des hauts-fourneaux, c’est que l’expérience a démontré l’infériorité des bouches à feu obtenues de première fusion ; et du reste elle a plus de bancs de forage qu’aucune autre ; elle a autant de fourneaux à réverbère que la principale fonderie de France (celle de Ruelle près d’Angoulême) 5 elle en a plus que la principale fonderie d’Allemagne (celle de Sayn près de Coblentz).

La fonderie de canons de Liège occupe 127 ouvriers; elle pouvait produire l’un dans l’autre, en 1836, une pièce par jour ; elle en produit une et demie depuis 1837.

Depuis que l’on confectionne à Liège des bouches à feu en fonte, des expériences positives ont démontré que les minerais et les fontes belges, traités par des mains habiles , peuvent rivaliser avec les meilleures fontes de Suède et peut-être les surpasser. L’excellente qualité des pièces coulées à la fonderie royale de Liège ressort encore des concours ouverts à La Fère en France, en 1835 et 1836, entre l’artillerie belge et l’artillerie française. »

Extrait de: De l’industrie en Belgique: Causes de décadence et de prospérité, par N. Briavannoine, 1839.

L’industrie à Liège
Sciences et techniques à Liège
Liège au 19ème siècle